Naissance de Saara, fille d’Elise et Isaak Nygård. Dépourvue de fibre maternelle, Elise se rue avec frénésie sur son scalpel et le bloc après un court congé maternité. De son côté, Isaak s’épanouit dans son rôle de père. Redéfinissant ses priorités, il lève le pied dans l’étude d’avocats qu’il a lancé.
Après des années de ressentiment à mots couverts est prononcé le divorce d’Elise et Issak. D’un commun accord, Isaak obtient la garde exclusive de leur fille. Dégagée des obligations familiales, Elise quitte Oslo pour une belle opportunité dans un hôpital de renom. Du haut de ses cinq ans, Saara fait ce jour-là une croix sur une quelconque relation avec sa mère. De toute façon, elle s’est lassée de mendier l’affection d’une femme qui peut d’un regard indifférent nier son existence.
Au hasard d’une conversation avec une lointaine connaissance en visite, Isaak et Saara apprennent le décès d’Elise un matin de premier avril 1996… Isaak se trouble l’espace d’un instant, tandis que la nouvelle glisse sur Saara. Du temps où ils partageaient la même adresse tous les trois, Elise était quasi une étrangère de passage dans leur maison.
École d’art et de culture, avec une orientation en manager du marché de l’art. Passionnée d’art, Saara s’est tout naturellement tournée vers un cursus artistique. Malgré sa créativité et un certain coup de fusain, elle s’aperçoit des limites de son talent par rapport aux étudiants les plus prometteurs. Déprimée et perdue sur son avenir, elle trouve – comme toujours – réconfort et conseils avisés auprès de son père. Ce dernier lui ouvre les yeux sur la profession de marchand d’art. Dans cette nouvelle voie, elle aura également plein pied dans le monde de l’art et pourra exploiter son œil pour repérer ce qui plaira aux collectionneurs.
Ouverture de sa propre galerie d’art à Oslo. Durant ses études et deux ans après, Saara travaille dans diverses galeries d’art pour s’enrichir d’expérience et bâtir une réputation. Le carnet d’adresses et les fonds de son père sont un coup de pouce appréciable pour la propulser. À 25 ans, elle ouvre donc sa première galerie d’art, alors que ses camarades de promo peinent encore à sortir du lot. La confiance indéfectible de son père a contribué à lui consolider une solide cuirasse, elle ne se laisse pas atteindre par les médisances. Si elle a profité des ressources de son père pour débuter, la pérennité de sa galerie est l’œuvre de ses intuitions artistiques et de son sens de la négociation hors pair.
Décès d’Isaak Nygård. Le chagrin anéantit Saara à la mort de son père des suites d’un accident de la route. Elle a encore tant besoin de lui. Pourquoi doit-on lui enlever le pilier de sa vie si tôt ? Avec lui périt la seule famille qui lui reste.
Découverte d’une lettre d’Elise. En rassemblant les affaires de son père avant la vente de la maison, Saara tombe sur une boîte. À l’intérieur des photos et des bibelotes. Sans doute des souvenirs de jeunesse. Une lettre glisse au sol. Elle la ramasse. Sur l’enveloppe, il est écrit son prénom avec une écriture qui n’est pas celle de son père. La lettre n’est pas décachetée et date de fin 1995. Elle pressent qu’Elise est l’auteur et pense la jeter sans la lire, aucunement curieuse de son contenu. D’ailleurs, si son père la lui avait donnée lorsqu’il l’avait reçue, elle l’aurait sans doute déchiquetée. Sans véritablement s’en rendre compte, elle a ouvert la lettre et en lit les premières lignes. De la colère gronda en elle au fil des excuses, des regrets et des remords exprimés. Elle n’a que faire qu’Elise n’était pas prête pour être mère quand elle était née. Elle s’apprête à déchirer le papier quand elle y lit qu’Elise attend un enfant… Fébrilement, elle relit le tout pour être certaine de comprendre correctement. Serait-il possible qu’à quelque part dans ce monde, il lui reste encore une famille ? Elle a peur d’y croire et d’être déçue ; dans son cœur naît un espoir qu’elle ne peut pas réprimer.
Déménagement à Vallhöl. Saara avait beaucoup hésité avant d’entreprendre des recherches sur son parent. Elle avait peur de s’investir et de poursuivre une chimère. Et puis finalement, elle engagea un détective privé. Plus les mois passèrent, plus l’espoir de Saara avait grandi. Ce fut donc avec un infini soulagement qu’elle accueillit la nouvelle d’un demi-frère vivant à Vallhöl. Le détective a rassemblé des informations succinctes, mais suffisantes. Il s’appelle Ezeÿel Skoëll, 21 ans, étudiant en art. Il a dans son entourage un père et un grand frère. Il n’a sans doute pas besoin d’elle, mais elle, elle a besoin de lui. Il est sa famille, le seul qui lui reste. Il lui fallut plusieurs mois pour préparer son déménagement et son installation à l’autre bout de la Norvège.
Ouverture à Vallhöl de VeriArt Galleri. Se contentant d’observer au loin son petit frère, Saara s’implante gentiment dans dans Vallhöl. Elle s’est mise en relation avec la faculté d’art avec la proposition de promouvoir des jeunes artistes en leur offrant gracieusement un espace d’exposition temporaire dans sa galerie.